Ne vous méprenez pas, je ne suis pas passé chez Suzuki, pas plus que je ne me suis mis au Ricard ni même devenu un fervent supporter des Canaris. Non rien de tout ça, c’est bel et bien la couleur dominante des difficultés empruntées durant cette rando, je vais vous expliquer.
Attention les yeux, flicage serré au parking, contrôle à la loupe des papiers, sonomètre avant le parc fermé, 250 gugus sur la grille , c’est du sérieux les Q’lasses vertes…
Tout est en règle, nous nous élançons sur le bitume et dans la brume épaisse qui recouvre sournoisement la campagne. Ce n’est pas franchement l’idéal pour attaquer sereinement la matinée. Le premier chemin se présente et de suite, il est impératif de cramponner le guidon tant la roue avant tente de se faire la malle, un coup dans la haie à droite, un coup à gauche dans le champ détrempé. Nous enchainons ainsi quelques longueurs de champs, nous traversons des pont-palettes jetés par-dessus les ruisseaux qui courent dans les prairies. Rien de compliqué jusqu’au moment où le terrain patinoire disparait pour devenir un côteau planté d’arbres, qui passent trop près du guidon et autour desquels il faut enrouler. Non pas vos membres, mais bien vous et votre machine afin d’atteindre le bas et le repos salvateur. ERREUR, le repos n’a pas cours aujourd’hui, tout est glissant, piégeux, il n’y a pas de répit, même la plus simple des pelouses est ,en fait , une véritable patinoire, sur la quelle même Candelloro aurait fini par se mettre les patins en l’air. De fait, au lieu de ruiner mon physique sur les rouges, j’opte systématiquement pour les jaunes et mon physique se détériore tout de même à vitesse grand V.
Adrien, affûté comme jamais, part devant, lassé de m’attendre trop souvent. Passé les côteaux grassouillets , les prairies inondées, les champs vomissant l’eau croupie de leurs ornières et les pont-palette, nous arrivons à « la carrière »… Carrière de quoi je ne sais pas. C’est plus impressionnant qu’autre chose et, chose assez inattendue, c’est l’endroit où il y a le plus de grip. Eh oui mesdames messieurs, du grip, du pneu qui accroche, de la roue arrière qui ne joue pas les papillons virevoltant à chaque rotation de la poignée. Bon , faut s’emballer non plus, on est quand même sur les cailloux et faut pas se louper ! On retourne sur les côteaux arborés, gras, et aussi alvéolés de trous de blaireau, que je ne manque pas de visiter, pour glisser jusqu’au terrain de cross. Enfin terrain de cross c’était avant, avant que cent cinquante fous furieux ne passent par là et ne transforme ce terrain en un champ de bataille. De la bouillasse, des ornières, des ornières de bouillasse et un peu de boue aussi.
Pas trop de solution pour gravir « La côte », je mets la 2 direct, je gaze à 3/4 et je ferme les yeux en priant pour que ça passe, non je déconne j’ai tout vu ! Le style n’y est pas mais je suis entier, en haut et du premier coup, s’il vous plait . Tout émoustillé de ce fait d’arme, je reprends des couleurs et c’est le moment où l’on attaque le roulant. De larges chemins aux profondes tranchées et aux flaques interminables (oui oui en un seul mot), le grip y est précaire mais nous pouvons nous faire plaisir avec quelques travers et monter rageusement dans les tours , il est enfin temps de laisser hénir les chevaux du plaisir. C’est de courte durée, fin du premier tour.
A peine midi quand je rejoints Adrien au paddok. Chaud bouillant , il rempli son bidon, et repart aussi sec, pourtant il est mouillé. Je passe mon tour, je reste au stand pour me remettre et j’en profite pour commencer à noter quelques idées pour les lignes que vous suivez en ce moment. 1h45 plus tard, Adrien est de retour, il n’a pas fait pas semblant le bougre ! Le bonhomme et la machine ont souffert. Les rayons de la Honda sont HS et les côtes du gars sont dans le même état, Game Over !!!
Nous allons déjeuner « Aux Chasseurs », où la nourriture est simple et bonne et l’accueil fort sympathique. Bon présage, lorsque nous sortons de table, le soleil a refait son apparition au-dessus de la campagne. Nous repartons pour le dernier tour accompagné de David et Steven, deux connaissances de mon co-équipier du matin. Pourqui-pourquoi, je me retrouve à ouvrir pour les deux gaziers. Le soleil et la bise qui souffle de l’Est ont un peu, je dis bien un peu sécher la piste et c’est tant mieux. Nous ne tomberons que quelques fois l’après-midi, trois pour ma part, et quasi à l’arrêt donc pas de bobo . Après la séance de côteaux gras numéro 25 , David rend les armes et fini par la route, épuisé par le terrain autant que par sa machine. Pour nous aussi la fatigue se fait sentir mais Steven et moi décidons de terminer cette boucle. Je me plante aussitôt dans un bourbier digne du Camel-Trophy, de la boue jusqu’à mi-botte, la HM qui tient debout par l’opération de sainte Gadoue. Je ressors du marécage, on met du gaz, on remet du gaz, je loupe un panneau et on se retrouve en train de faire du jet-ski au milieu de la campagne vendéenne ! De l’eau par-dessus les cales pieds et ça sur plusieur centaines de mètres. On débouche dans un pré, gorgé de flotte et sans issue, c’est sans espoir, demi-tour ! C’est reparti pour la séance de jet-ski, on termine la boucle trempé jusqu’aux os et aussi vide qu’une bouteille de whisky un soir de Saint Patrick mais fiers et heureux d’avoir fini.
J’ai beaucoup hésité sur le titre, cet article aurait très bien pu s’appeler « horse killer » tant les bourbiers semblaient littéralement avaler la roue arrière et emmener à l’abattoir tous les chevaux de votre moteur. Cela aurait pu être « chuter c’est progresser », et cette rando fut l’occasion d’une révision pré-bac, j’ai bien révisé toutes les matières y compris celles du terrain (pierre, pelouse, glaise marécage, trou de blaireau, racines) tout y est passé.
J’entends d’ici les sarcastiques me dire « c’est normal vu ton niveau et celui de ta crêpière » à ceux là je leur dis simplement , messieurs vous n’y étiez pas, à l’année prochaine, pour les plus courageux …
Merci à Adrien pour le covoiturage et aussi à mes deux compagnons de l’après-midi, on a passé un bon moment,
Merci à l’organisation, l’accueil, le parcours, le resto tout était très bien, c’était super dur mais on reviendra avec grand plaisir .
La Crêpière.